LE RÉCIT INFERNAL D’UNE HÔTESSE DE L’AIR RYAN AIR

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Elle s’était rêvée hôtesse de l’air, courant le monde, entre deux vols intercontinentaux et des hôtels quatre étoiles. Elle a très vite déchanté. Dans un livre paru aux éditions Les Arènes, Bienvenue à bord !, Sofia Lichani, 31 ans, raconte quatre années infernales dans l’école de l’aérien la plus âpre et violente des temps modernes : Ryanair. Coécrit avec le journaliste Thomas Rabino, son témoignage – le premier d’une hôtesse de l’air low cost – jette une lumière crue sur les conditions de travail esclavagistes pratiquées par la compagnie irlandaise et secoue quiconque a l’habitude de s’envoler à très bas coût pour un week-end à Marrakech ou à Amsterdam, sans prêter attention, un regard, au quotidien éreintant de ces galériens du ciel.

« Nos employés sont comme des citrons. On les coupe en deux, on en presse le jus et on les jette », aurait professé le grand patron de la firme aux profits records devenue le premier transporteur européen, Michael O’Leary, avant de démentir. Sofia Lichani est un très bon témoin du coût du low cost sur les individus. Admise en vingt minutes, formée en un temps record sur le sol irlandais, à ses propres frais (comme son uniforme et toutes les boissons et repas qu’elle consomme à bord), affectée d’abord à Shannon, en Irlande, puis à Marseille, elle va enchaîner plus de 5 000 heures de vols pour à peine un Smic pendant cinquante-cinq mois et sous le régime d’un CDD intérimaire régi par le droit du travail irlandais.

Six jours sur sept, elle tient les cadences et les pressions terribles (pour compenser la faible marge des billets d’avion, il faut réaliser un maximum de ventes à bord, sous peine d’être viré du jour au lendemain), sans jamais se départir de son sourire, ni s’effondrer avec son chignon impeccable, ni rechigner à nettoyer les avions avec ses camarades d’infortune alors qu’elle est mentalement, physiquement, au bord de l’épuisement. Son salut arrive lorsque Ryanair plie bagages de Marseille, fin 2010, après sa mise en examen pour travail dissimulé, entrave au fonctionnement du comité d’entreprise, à celui des délégués du personnel, à l’exercice du droit syndical et emploi illicite de personnels navigants.

La compagnie – qui stationnait quatre avions à Marseille et employait 127 salariés sans déclarer cet établissement ni verser les cotisations sociales, estimant que ces contrats de travail étaient régis par la législation sociale irlandaise – sera condamnée à 200 000 euros d’amende et 8,1 millions d’euros de dommages-intérêts. Peine confirmée en appel en 2014.

Sur Anti-K

« Le low cost  coute très cher en terme humain et subventions publics » … C. PAFO